Conclusions
finales des représentants des victimes
Durant deux heures, les six représentants des victimes ont
rappelé leurs préoccupations essentielles : l’établissement
de la vérité, c'est-à-dire l’identification,
la condamnation et la punition de ceux qui leur ont fait du tort.
Ils ont rappelé les traumatismes subis et ont exhorté
la Cour à ne pas se prononcer en faveur de l’impunité.
L’indépendance des victimes par rapport aux
procureurs
Maître Massida a insisté sur le fait que les victimes
n’étaient pas des assistants des procureurs, mais avaient
eu des initiatives propres. Elle a rappelé aussi que selon
les représentants des victimes, l’accusé n’était
pas seulement co-auteur, mais auteur direct des crimes qui lui étaient
reprochés. Elle a décrit le parcours des enfants soldats
: recrutés au sein des forces armées de l’UPC/FPLC,
forcés à suivre une formation militaire dans les camps
d’entraînement, mis au combat, forcés à
utiliser leur arme, à tuer des « ennemis ». Ils
sont souvent devenus « gardes du corps » de commandants.
Les filles, en plus des activités « militaires »
devenant esclaves sexuelles des commandants. Elle a évoqué
les conséquences psychologiques et physiques désastreuses
que subissent les anciens enfants soldats.
Mme Massida a aussi parlé longuement des pressions, des persécutions
qu’ont eues à subir ces victimes de la part de leur famille
et de leur communauté parce qu’elles acceptaient de témoigner
devant la Cour, et elle a ainsi mis en cause la Défense dans
le revirement « miraculeux » de la position de certaines
d’entre elles.
Des écoles vidées à moitié
Un représentant des victimes, M. Paul Kabongo Tshibangu a présenté
des rapports détaillés selon lesquels les écoles
d’Ituri avaient été à demi vidées.
S’appuyant sur des rapports de Human Right Watch, et sur les
émissions de la radio de la MONUC, il a insisté sur
le fait que les milices dont celle dirigée par Thomas Lubanga
ont recruté en 2002-2003 des enfants de 7 à 17 ans.
Les enlevant dans des écoles, sur des marchés, sur la
route ou en demandant aux familles de « donner » leur
enfant pour la défense. Mais c’est surtout en s’appuyant
sur des témoignages de victimes de la conscription, qu’il
a plaidé l’inculpation de l’accusé dans
ce crime.
Des témoins fiables
M. Joseph Keta Orwinyo a insisté sur la fiabilité des
témoignages. Il a démonté les arguments de la
défense qui tentaient de décrédibiliser les dépositions
des victimes/témoins et qui ont donné lieu à
la suspension du procès en juillet-août 2010.
M. Mulenda a exposé les problèmes posés par l’absence
d’état civil dans cette région de RDC, démontant
ainsi les arguments de la défense qui conteste l’âge
et le nom des victimes. Il a aussi rappelé les menaces reçues
par les victimes qui ont accepté de venir témoigner
devant la Cour. Il a conclu en rappelant que selon lui, « la
guerre en Ituri n’a pas profité à la majorité
de la population. Elle n’a pas non plus été organisée
pour sauver des communautés. Au contraire, ce sont les ressources
naturelles qui ont attiré les belligérants »
Les violences sexuelles
Mme Carine Bapita Buyangandu a proposé que bien que ne figurant
pas dans les charges retenues, les sévices sexuels sur les
filles soldats soient considérés comme « circonstances
aggravantes ». Si l’accusé était reconnu
coupable, il s’agirait de prendre en compte cette charge dans
l’établissement de la peine.
En conclusion ; le portrait de Thomas Lubanga par un avocat
des victimes
M. Walleyn a conclu les dépositions des avocats des victimes
en faisant un portrait de l’accusé. Contrairement à
ce que prétend la défense, Thomas Lubanga n’est
en aucun cas un défenseur des droits de l’homme. Son
mouvement, l’UPC n’a jamais eu le projet d’instaurer
une démocratie. « Selon nombre d’observateurs internationaux,
y compris ceux qui ont comparu devant cette Cour, les milices de l’accusé
et d’autres seigneurs de guerre de l’Ituri n’ont
en rien restauré l’ordre et protégé les
civils. »
Selon M. Walleyn, l’accusé était un leader charismatique,
un chef militaire. « Oui, les Kadogo étaient sous son
charisme, ce qui a même pu créer des conflits de loyauté.
»
Thomas Lubanga, en tant que chef de guerre est co-auteur des campagnes
de recrutement d’enfants.
Les arguments de la défense ont été présentés
vendredi 26 août (voir lettre 46-3)
Compte-rendu rédigé à partir des minutes
du procès par Ph. Brizemur Amnesty International France, Commission
enfants