Amnesty International France

Commission Enfants


comenfants@amnesty.fr

Le procès Lubanga devant la cour pénale internationale

Lettre d'information n° 43

avril 2011

version pdf

Le secrétaire particulier de Thomas Lubanga témoigne

Utiliser des enfants soldats n'était pas dans les "valeurs" de Thomas Lubanga
Michel Angayika Baba était le secrétaire particulier de Thomas Lubanga et dit ne l'avoir jamais quitté.
Lors de sa déposition il a affirmé qu'utiliser des enfants soldats n'était pas dans les valeurs de Thomas Lubanga, et qu'il n'a jamais vu d'enfants dans ses gardes du corps.
Lors de la reprise de Bunia par les Forces Patriotiques de Libération du Congo (FPLC) en mai 2003, il a bien vu des enfants soldats utilisés par une autre milice qui s'est ralliée ensuite à l'Union du Peuple Congolais (UPC). Il prétend que Thomas Lubanga a ordonné leur démobilisation immédiate.

Les enfants "suivaient" les soldats
Le procureur Manoj Sachdeva a pressé le témoin de divulguer la présence d’enfants dans les FPLC. M. Baba a admis ce fait, mais a expliqué que les enfants suivaient les soldats pour obtenir de la nourriture et de la protection et les considéraient comme des figures paternelles. Ils leur demandaient des vestes et des pantalons. En retour, les enfants étaient invités à transporter du matériel militaire. Ils n’étaient pas formés pour être des soldats, a souligné M. Baba. Il ne connaissait aucune procédure utilisée par le FPLC pour vérifier l’âge des soldats.

Un secrétaire qui oublie beaucoup de choses
Le procureur a aussi présenté à M. Baba un document où le secrétaire général à l'éducation et à la jeunesse a informé un commandant des FPLC à Bunia que les enfants de 10, 15 et 16 ans qui étaient prêts à réintégrer la vie civile devaient être démobilisés, ce qui signifierait que ceux qui ne le désiraient pas pouvaient rester dans les forces armées. M. Baba dit ignorer pourquoi cette circulaire avait été rédigée comme cela et n'a pas non plus voulu admettre que Thomas Lubanga avait annulé le programme de démobilisation.
Il ne se souvient pas du meeting du 12 février 2003 où l'accusé avait harangué ses troupes et appelé à la mobilisation, ce qui montre bien que l'UPC était loin de vouloir démobiliser.

Pourtant l'ONU avait demandé la démobilisation des enfants
Il a aussi admis que Thomas Lubanga avait reçu des plaintes adressées par l'ONU et d'autres organisations internationales sur le recrutement d'enfants soldats, mais il a mis cela sur le compte des critiques des mouvements rebelles pour leur donner une mauvaise réputation.
Il confirme que des enfants étaient présents au rassemblement militaire de juin 2003, à Bunia lorsque l'UPC a repris la ville. Mais il prétend que Thomas Lubanga aurait demandé leur démobilisation. Le procureur doute que cette demande ait été transmise et ait eu un quelconque effet.
Face à un reportage diffusé sur la radio de la MONUC, le 7 février 2003, qui montre que Thomas Lubanga avait exigé que chaque famille sous son contrôle envoie volontairement un enfant afin de contribuer à la réalisation de l'objectif militaire de l'UPC, M. Baba dit ne pas s'en souvenir, pas plus qu'il ne se rappelle que Thomas Lubanga se soit plaint de n’avoir jamais été informé que l'UPC ne pouvait pas recruter d'enfant.

Des enfants de moins de quinze ans combattaient dans les milices d'auto défense des villages Hema
Le troisième témoin présenté par la défense de Thomas Lubanga était Origen Lokana Nyamutale Katekpa, coordinateur des milices d'auto-défense des villages Héma. Il a expliqué que ces milices avaient besoin de tout le monde sans considération d'âge. Les villageois achetaient eux-mêmes leurs armes, souvent auprès des militaires ougandais.
Ce témoin a tenté de montrer la déconnexion entre les FPLC (milice armée de l'UPC présidée par Thomas Lubanga) et les milices d'auto-défense. Il a fait mention d'une rencontre avec la direction de l'UPC où Thomas Lubanga aurait demandé de démobiliser les enfants de moins de 18 ans et de confier les armes aux FPLC. Mais cela est en contradiction avec les notes personnelles qu'il a prises lors de cette rencontre. Thomas Lubanga aurait demandé la démobilisation de tout le monde sans préciser l'âge, pour laisser la maîtrise du terrain aux FPLC. Les milices d'auto-défense ont refusé.

Pour en savoir plus

Compte-rendu rédigé à partir des notes prises par Judith Armatta

La voix du peuple…
Une radio communautaire de Goma pose des questions à la population sur la cour pénale internationale (en français).
A écouter sur: http://www.irfj.org/category/drc/kivus-goma-voxpop/

Retrouvez toutes les lettres d'information sur le site du groupe 405 http://ai405.free.fr rubrique Actualité "Suivi du procès Lubanga"

Sources:

Les minutes du procès: site de la CPI.
http://www2.icc-cpi.int/Menus/ICC/Situations+and+Cases/Situations/Situation+ICC+0104/Related+Cases/ICC+0104+0106/Transcripts/Trial+Chamber+I/

Le calendrier des audiences à la CPI: http://www2.icc-cpi.int/Menus/ICC/Situations+and+Cases/Hearing+Schedule/Upcoming+Hearings.htm On peut aussi suivre les retransmissions vidéo des auditions (lorsque celles-ci ne sont pas à huis clos)

Des articles de journalistes suivant le procès. http://www.lubangatrial.org/  

La présentation des journalistes qui suivent le procès: http://www.lubangatrial.org/contributors/#4

On peut aussi consulter:
Le site de Human Right Watch en français: http://www.hrw.org/fr/news/2009/01/23/le-proc-s-de-thomas-lubanga-la-cour-p-nale-internationale
On peut aussi visionner un résumé vidéo de la première journée du procès sur le site de la FIDH: http://blog.gardonslesyeuxouverts.org/post/2009/01/26/Resume-video-de-laudience-du-26-janvier-2009