Amnesty International France

Commission Enfants


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Le procès Lubanga devant la cour pénale internationale

Lettre d'information n° 36

15 octobre 2010

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Décision des juges d'appel : Thomas Lubanga ne sera pas libéré
Le procès devrait reprendre bientôt

Décision disproportionnée
Les juges d'appel, ont estimé que la décision de la cour de première instance, prise le 8 juillet 2010, d'arrêter la procédure et de libérer immédiatement Thomas Lubanga était disproportionnée face aux fautes des procureurs.

Un an et demi de procédure, plus de quatre ans d'emprisonnement
Thomas Lubanga est inculpé de crime contre l'humanité pour avoir recruté, conscrit et utilisé des enfants soldats de moins de quinze ans durant la guerre qui a ravagé l'Ituri au Nord-Est de la République Démocratique du Congo entre 2002 et 2004 (en fait avant mais la CPI ne peut inculper pour des faits antérieurs à sa création).
Cet ancien commerçant en demi-gros de haricots du marché de Bunia, diplômé en psychologie de l'université de Kisanghani, était le chef de l'Union des Patriotes Congolais (UPC) et est accusé d'avoir participé aux activités de sa milice.
Il a été arrêté et incarcéré à La Haye en mars 2006. En 2008, il a bien failli être libéré pour les mêmes motifs qu'en juillet dernier. Son procès a débuté en janvier 2009.

28 témoins pour l'accusation
De janvier à juillet 2009, les procureurs ont présenté 28 témoins à charge, anciens enfants soldats, et trois experts. Ils ont mis en évidence les conditions dans lesquelles étaient placés les enfants soldats enrôlés dans les milices de l'UPC.
A l'écoute de ces témoignages, les représentants des victimes ont demandé en mai 2010 l'ajout des charges d'esclavage sexuel et traitement cruel. Cette demande a été repoussée en décembre 2009 par les juges d'appel.
En janvier 2010, trois victimes ont déposé comme témoins devant le tribunal.
Fin janvier 2010, la défense accuse des intermédiaires du bureau du procureur (personnes aidant les enquêteurs sur le terrain à trouver des témoins) d'avoir "coaché" certains témoins de l'accusation, les amenant à mentir sur leur condition d'anciens enfants soldats. Le témoignage de ces intermédiaires est demandé par les juges et débute fin juin 2010.

Le refus des procureurs
Les procureurs refusent, pour des raisons de sécurité, de divulguer à la défense le nom d'un des intermédiaires, désobéissant ainsi à un ordre des juges. Devant ce refus, les trois juges de la chambre de première instance décident le 8 juillet de suspendre la procédure et de libérer immédiatement l'accusé. Ils estiment qu'il y a "abus de procédure", et que dans ces conditions, Thomas Lubanga ne bénéficie pas d'un procès équitable.
Les procureurs font immédiatement appel de cette décision. Voir la lettre n°35.

La décision des juges d'appel
Ils ont estimé qu'une sanction des procureurs aurait été l'outil adapté pour garder le contrôle de la procédure et garantir un procès équitable sans avoir recours au "remède drastique de la suspension de la procédure".
Thomas Lubanga restera donc en prison et le procès devrait reprendre.

Reprise prochaine du procès
Les procureurs et la défense doivent se réunir pour indiquer quand ils seront prêts à reprendre les débats. Lorsque le procès a été suspendu, un intermédiaire du Bureau du Procureur et deux enquêteurs devaient être entendus. Les procureurs on prévu la déposition d'un témoin pour réfuter la thèse de la défense. Après cela, celle-ci exposera ses arguments pour tenter de démontrer que les intermédiaires ont fabriqué des témoignages et coaché des témoins, invalidant ainsi les témoignages de l'accusation.

Retransmission du procès en direct
On peut suivre en direct le procès en se connectant à: http://livestream.xs4all.nl/icc2.asx

A lire aussi... les réactions en Ituri
Un commentaire écrit par Olivia Bueno de "L'international Refugee Rights Initiative" en concertation avec des militants congolais sur http://www.lubangatrial.org/2010/10/13/the-lubanga-trial-resumes-responses-from-ituri/
Réaction de la communauté Héma (communauté de Thomas Lubanga), de ses rivaux du FNI, craintes des ONG de défense des droits des victimes et des droits humains et de la communauté Lendu, dont deux leaders sont actuellement en jugement devant la CPI. Mais surtout l'incompréhension de la population sur les lenteurs de la CPI. Enfin, elle fait mention du risque de la reprise des conflits ethniques, surtout si Thomas Lubanga est libéré.

La voix du peuple…
Une radio communautaire de Goma pose des questions à la population sur la cour pénale internationale (en français).
A écouter sur: http://www.irfj.org/category/drc/kivus-goma-voxpop/

Compte rendu réalisé d'après les minutes du procès et les rapports de Wairagala Wakabi

Retrouvez toutes les lettres d'information sur le site du groupe 405 http://ai405.free.fr rubrique Actualité "Suivi du procès Lubanga"

Sources:

Les minutes du procès: site de la CPI.
http://www2.icc-cpi.int/Menus/ICC/Situations+and+Cases/Situations/Situation+ICC+0104/Related+Cases/ICC+0104+0106/Transcripts/Trial+Chamber+I/

Des articles de journalistes suivant le procès. http://www.lubangatrial.org/   La semaine 16 a été suivie par Rachel Irwin

La présentation des journalistes qui suivent le procès: http://www.lubangatrial.org/contributors/#4

On peut aussi consulter:
Le site de Human Right Watch en français: http://www.hrw.org/fr/news/2009/01/23/le-proc-s-de-thomas-lubanga-la-cour-p-nale-internationale
On peut aussi visionner un résumé vidéo de la première journée du procès sur le site de la FIDH: http://blog.gardonslesyeuxouverts.org/post/2009/01/26/Resume-video-de-laudience-du-26-janvier-2009