La défense poursuit ses attaques
contre les intermédiaires de la CPI
Un certain "M. X"
La défense a présenté cette semaine trois témoins
qui affirment avoir menti aux enquêteurs de la CPI.
Le témoin de mercredi affirme avoir reçu d'un certain
"M. X" de l'argent en contre partie de mensonges aux enquêteurs
de la CPI. Il a reconnu avoir signé des reçus pour 400$
(remboursement de services rendus et dépenses effectuées)
mais a déclaré "on ne m'a pas donné cette
somme en une seule fois". Il ne se souvient plus avoir reçu
les sommes de 700$, 40$ (perte de revenu), 10$ (transport) alors qu'il
reconnaît sa signature sur les reçus. De même pour
des remboursements de dépenses effectuées à Kampala
(Ouganda). Il aurait reçu cet argent de "M. X", jamais
des enquêteurs de la CPI.
Ce "M. X" n'a jamais assisté aux entrevues qu'il
a eues durant six jours avec les enquêteurs à Kampala,
mais ce témoin déclare qu'il lui rendait compte chaque
soir.
Il aurait ainsi déclaré aux enquêteurs qu'il avait
été enfant soldat.
Il nie maintenant et déclare avoir changé de plan lorsque
des soldats de l'UPC et des membres de sa famille l'ont menacé.
Il déclare aussi avoir reçu une lettre anonyme, lue
durant l'audience, le menaçant de mort, qui aurait été
écrite par "M. X" et mettant en cause l'UPC.
Le procureur: "on ne peut plus vous croire"
Le procureur Manoj Sachdena a indiqué à ce témoin:
"Vous avez menti au bureau du procureur pendant les quatre
dernières années. Maintenant, on ne peut plus vous croire".
Le témoin a aussi avoué qu'il téléphonait
aux enquêteurs lorsqu'il était saoul pour solliciter
de l'argent ou pour demander à être transféré
hors de RDC.
Ancien combattant de l'UPC
Auparavant, lundi, le septième témoin présenté
par la défense a déclaré qu'il s'était
engagé volontairement avec un groupe de jeunes qui ne savait
où aller, dans la milice de l'UPC.
Le témoin de l'accusation n°15 fera sa
déposition la semaine prochaine
Lors de la phase de l'accusation, le 16 juin 2009, un témoin
avait déclaré qu'il avait menti aux enquêteurs
de la CPI. En septembre, devant le procureur et la défense
il a affirmé qu'il avait donné une fausse identité,
n'avoir jamais été entraîné au centre de
Mandro, et n'avoir jamais assisté à aucune activité
dans ce camp. Il a également nié avoir vu certaines
personnes de l'UPC dans ce camps d'entraînement ou avoir assisté
aux rapports quotidiens entre Bosco N'Taganda et Thomas Lubanga. Il
a aussi affirmé avoir menti sur le fait d'avoir subi un entraînement
au Rwanda.
Les procureurs de la CPI réfuteront les
allégations de la défense
Hommage aux intermédiaires et témoins
Dans une interview donnée à Wairagala Wakabi que l'on
peut lire sur le
site internet du procès, Béatrice Le Fraper du Hellen,
responsable de la Division de la complémentarité et
de la coopération entre les juridictions, qui fait partie du
bureau du procureur (BdP) rend hommage aux intermédiaires et
aux témoins qui ont osé venir à La Haye. Elle
y affirme avec véhémence que nous ne devrions pas croire
les dires de la défense qui prétendent que des intermédiaires
auraient pu influencer les enfants soldats.
"Nous devons souligner les risques encourus par les intermédiaires.
Il n'est pas facile de se trouver en Ituri, disant à un enfant
de l'ethnie Hema qui a été recruté, enrôlé,
forcé à violer, tuer par un leader Hema, qu'il pourrait
aller devant la CPI et se porter témoin. Donc leur situation
est difficile en terme de protection et pour cela le BdP leur voue
une grande admiration…"
"Les allégations portées par la Défense
à l'encontre des intermédiaires seront réfutées
au tribunal par l'Assistant du Procureur, Fatou Bensouda."
C'est la dernière ligne de défense
de l'équipe de Maitre Mabille
Dans cette interview, Béatrice Le Fraper du Hellen estime que
la question des intermédiaires est la dernière ligne
de défense de l'équipe de la Défense de Thomas
Lubanga;"… parce qu'ils n'ont pas d'arguments…"
"Comme je l'ai déjà dit, la Défense a
utilisé ce moyen comme ultime recours. Ils n'aiment pas ce
que disent les enfants soldats et donc, ils prétendent que
ceux-ci auraient été influencés."
Le courage des témoins
Elle évoque aussi le courage des témoins; "C'est
terrible, mais la plupart des membres du groupe ethnique des Hemas
en Ituri les considère comme des traitres. Je le déplore,
vous le déplorez, nous le déplorons tous, mais telle
est la réalité".
"Ils étaient dans la salle d'audience avec Lubanga et
vous savez, M. Lubanga faisait des signes au public, il souriait,
il faisait beaucoup de gestes et d'expressions; les enfants étaient
terrifiés en témoignant devant lui".
"J'affirme que nous avons de très courageux enfants soldats
qui ont réussi à se refaire une vie après tout
ce qu'ils ont enduré. Pas tous y sont parvenus; nous en avons
beaucoup qui sont des causes perdues pour la société,
des toxicomanes… Il y a des filles qui n'ont pas pu venir et
témoigner parce qu'elles se prostituent, sont complètement
dépendantes de la drogue, et nous ne pouvions pas les prendre
comme témoins crédibles dans ce procès. Et je
pense que nos témoins furent très crédibles parce
qu'ils ont vraiment montré les conséquences du recrutement
d'enfants soldats sur les perspectives d'avenir de ceux-ci. Donc la
défense parle à présent d'intermédiaires,
je parle moi, d'enfants soldats et de leurs souffrances".
Compte rendu réalisé d'après les minutes du procès
et les rapports de Wairagala
Wakabi