Comment je fus enlevé et conscrit dans la milice
de l'UPC
Jeudi 22 un ancien enfant soldat, qui témoigne comme victime dans
le procès de Thomas Lubanga, a raconté comment il fut enlevé
et conscrit dans la milice de l'UPC. Il raconta que des combattants de
l'UPC l'ont enlevé alors qu'il revenait de l'école. Ils
l'ont emmené dans un camp d'entraînement près de la
ville de Bule dans l'Est de la RDC. A la question de certifier qu'il s'agissait
bien de l'UPC, le témoin dit qu'il en était sur à
cause des uniformes.
"Je revenais de l'école, et je n'étais pas encore
arrivé chez moi". Il se rappelle avoir demandé
aux miliciens où ils l'emmenaient. "Ils me dirent de continuer
avec eux."
Qu'importe l'âge
Ni ceux qui l'ont enlevé, ni les instructeurs ne lui ont demandé
son âge. Il dit que les mêmes punitions étaient infligées
dans les camps d'entraînement, quel que soit l'âge ou le
genre.
A la question de la procureure Olivia Struyven, sur l'âge des
recrues qu'il a côtoyées dans le camp d'entraînement,
le témoin répond qu'il ne peut le dire, certains étaient
plus âgées d'autres avaient le même âge que
lui. Ce n'est qu'à huis clos que son âge propre a été
spécifié, mais il se décrit lui-même comme
un enfant soldat.
Enfant éclaireur et porteurs de munitions
Il décrit à la cour que durant l'attaque de Bunia, lui
et d'autres garçons étaient utilisés comme éclaireurs.
Il indiquait les positions des ennemis de l'UPC aux autres combattants.
Il dit qu'on lui a tiré dessus et qu'il a été blessé
au pied lors de cette bataille.
Lors de la bataille de Mogwalu, sa fonction était de porter les
caisses de munitions au front. Il assure que des garçons de son
âge portaient des fusils lors des batailles de Bunia et Mongwalu
et prenaient part aux combats. Il n'a pas dit si lui-même avait
tiré avec un fusil lorsqu'il était dans l'UPC. Dans les
camps d'entraînement, il a appris à démonter et
remonter une mitrailleuse. Ceux qui n'y arrivaient pas étaient
fouettés.
Pas de quartier
A la question de la procureure sur ce que devenaient les ennemis capturés
par les miliciens, le témoin raconte qu'une fois qu'ils avaient
donné les renseignements demandés, ils étaient
tués. "Je l'ai vu durant la bataille". Il a
déserté les rangs de l'UPC durant la bataille de Mongwalu,
parce qu'il avait peur d'être tué.
La torture dans les camps de l'UPC était routinière
Les deux témoins qui ont terminés leur déposition
devant la cour jeudi et vendredi ont confirmé les punitions et
les tortures qui avaient cours dans les camps d'entraînement.
"Ils nous punissaient en nous mettant dans un trou et vous deviez
rester debout." Parfois les recrues étaient obligées,
lorsqu'elles étaient accusées de violence à se
rouler dans de l'eau sale. On était fouettés si on ne
finissait pas l'exercice durant la pluie.
Les deux témoins ont assuré que l'UPC avait envoyé
des enfants soldats au front et que certains avaient été
tués. Ils ont tous les deux été blessés.
Des contradictions dans les témoignages
Lors du contre interrogatoire du deuxième témoin, l'avocate
de Thomas Lubanga, Maitre Catherine Mabillle a remarqué que dans
le témoignage que cet ancien enfant soldat avait fait en 2006
(lors de l'enquête préliminaire), il avait parlé
d'un entraînement de deux mois et demi, alors qu'il ne parle plus
maintenant que d'une semaine. Le témoin confirme qu'il s'agissait
d'une semaine. De même aux questions de l'avocate, il concède
que ce qu'il avait dit en 2006 concernant les batailles dans deux autres
villages était également incorrect.
Thomas Lubanga était bien le chef de l'UPC
Les trois témoins présentés par les représentants
des victimes, l'ancien maitre d'école et les deux anciens enfants
soldats ont confirmé que Thomas Lubanga était bien le
commandant des milices de l'UPC.
La défense présente ses témoins à partir
de la semaine du 25 janvier
Il a fallu trois ans, dix mois et une semaine à attendre pour
que la défense puisse dire à la cour pourquoi les juges
doivent libérer Thomas Lubanga. Ce dernier a 49 ans. Il est diplômé
en psychologie. Il est en détention à La Haye depuis mars
2006. Il plaide non coupable des crimes de guerre dont il est inculpé.
Les procureurs ont présentés 36 témoins, les représentants
des victimes en ont présenté trois. Ils ont soutenu l'accusation.
L'équipe de Catherine Mabille devrait présenter trente
témoins pour soutenir son innocence. Elle va probablement essayer
de discréditer les témoins de l'accusation et des victimes
sur les faits: était-il commandant des milices, a-t-il pris une
part active dans le recrutement d'enfants de moins de quinze ans dans
le conflit, et avait-il la connaissance de l'existence des enfants soldats
au sein de l'UPC et des forces du FPLC (front patriotique de libération
du Congo).
Lundi 25 janvier, deux des trois témoins rappelés
à la barre, à la demande de la défense
Le juge Fulford a déclaré que le représentant des
victimes Joseph Keta, et la procureure Olivia Struyven avaient présenté
aux juges des documents dont les contenus ont été trouvé
suffisants par la chambre pour nécessiter le rappel à
la barre des deux premiers témoins. L'ancien maître d'école
et un des anciens enfants soldats ont donc été rappelés
pour répondre à des questions complémentaires,
à la demande de la défense. Mais pratiquement tout leur
témoignage s'est déroulé à huis clos.
En séance publique, l'ancien enfant soldat répondant à
une question de la juge Elizabeth Odio-Benito a confirmé que
les filles portaient l'uniforme, que "quelques unes étaient
des compagnes de soldats", et qu'il "avait vu deux d'entre
elles combattre".
Compte rendu rédigé à l'aide des rapports
de Wairagala
Wakabi du Institut for War and Peace Reporting
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