Rédigé à partir des minutes
du procès et des comptes-rendus de
Rachel Irwin
Le témoin 15 qui avait avoué le 12 juin avoir fait
un faux témoignage viendra devant la cour en octobre prochain.
Mardi 7 mercredi 8 jeudi 9
Témoignage de Christine Peduto, qui a travaillé en RDC
en 2002 et les années suivantes à Bunia, une des principales
villes de l'Ituri à la réintégration des enfants
soldats.
Témoignage en français sans mesure de protection.
Mai 2003, date à laquelle les armées ougandaises ont
quitté l'Ituri. L'UPC dont Thomas Lubanga était le président
a alors pris le contrôle de la région.
Des enfants soldats de 11 ans
Christine Peduto dit qu'elle a vu un enfant qui avait été
recruté à 10 ans comme garde du corps de Floribert Kissembo,
un officier de haut rang de l'UPC.
"La situation était tendue", dit-elle "les
enfants qui avaient été démobilisés étaient
désorientés".
La vérification des âges était difficile. "Il
n'y a pas de méthode scientifique pour déterminer l'âge
d'un enfant", a-t-elle répondu au procureur. Habituellement
on reliait des informations venant de différents entretiens
de travailleurs sociaux avec les enfants. L'apparence physique est
un critère, mais n'est pas le principal. "Les cartes
ou documents d'identité ne sont pas très courant au
Congo, je n'ai jamais vu un enfant avec une carte d'identité
en Ituri".
"Je leurs posais de nombreuses questions, tant qu'ils voulaient
bien répondre". "Il était important d'identifier
les dates de recrutement, qui les entraînait, à quelles
batailles ils avaient participé et le dernier commandant sous
lequel ils avaient servi"."Lorsque vous évaluez un
enfant, vous ne vous basez pas seulement sur ce qu'il dit, mais sur
sa manière d'agir. J'ai vu des cas de petits enfants qui commençaient
à pleurer dans mon bureau. La plupart des enfants de 18 ans
ne feraient pas cela".
Elle a témoigné d'un incident au cours duquel deux très
jeunes enfants avaient été emmenés dans son bureau
et, au moment où elle avait commencé à les interroger
ils avaient fondu en larmes.
"Il avait si peur. Je me revois tenant la main du plus jeune
pour traverser la rue avec lui. Il était si petit… ils
[venaient de] l'UPC".
"Les informations étaient croisées avec une chronologie
des évènements pour s'assurer que leurs propos correspondaient
à la réalité".
220 enfants soldats de moins de 15 ans ont été traités
par le bureau de la MONUC en 2004
220 anciens enfants soldats ont été traités
par le bureau de Bunia de la MONUC en 2004, 167 d'entre eux avaient
été associés à certains moments à
l'UPC. "Pour être très claire", ajoute
Christine Peduto "cette proportion ne signifie pas qu'il y
avait plus d'enfants dans l'UPC que dans les autres groupes".
"Nous avions seulement plus accès aux [enfants soldats]
de l'UPC parce que nous étions à Bunia".
Ntaganda a tué des enfants soldats
Ntaganda adjoint de Thomas Lubanga est inculpé par la CPI,
mais est encore en fuite. Il a intégré l'armée
nationale de la RDC. C. Peduto a recueilli des témoignages
d'enfants sur l'exécution sommaire d'un enfant qui tentait
de s'échapper, menée par Ntaganda.
Refus de collaborer de Thomas Lubanga
C. Peduto s'est rendu chez Thomas Lubanga dans la ville de Bunia
le 30 mai 2003 pour discuter de la question des enfants soldats, de
leur enrôlement forcé et des tactiques employées
par la milice de l'UPC.
"Contrairement à la réaction d'autres groupes
armés que j'avais rencontrés avant, il n'y avait aucun
signe [de la part de Lubanga] d'une quelconque volonté de coopérer",
"Il n'y avait aucun signe d'ouverture d'esprit ni de volonté
de discuter véritablement la question".
De nombreux enfants soldats et presque toutes les filles ont été
violées par les commandants de l'UPC
C. Peduto a déclaré que presque toutes les filles qu'elle
avait interrogées avaient été violées
par les commandants de l'UPC. La plus jeune victime qu'elle ait interviewée
avait 12 ans.
Il arrivait souvent que les filles tombent enceinte, et de nombreuses
autres se faisaient avorter ou faisaient des fausses couches en raison
des mauvaises conditions d'hygiène dans les camps d'entraînement.
Celles qui gardaient leur bébé étaient rejetées
par l'UPC, puisqu'elles n'étaient plus utiles.
"Certaines jeunes filles décrivaient cela comme un
mariage. Elles parlaient de leur première relation légitime.
C'est la manière dont elles voyaient cela". "Elles
se sont rendues compte qu'il ne s'agissait pas d'une relation légitime
avec le premier officier". "L'état psychologique
et physique de ces jeunes filles était assez terrible, assez
catastrophique".
Des traumatismes graves et durables
Les enfants soldats souffraient de traumatismes graves et durables,
a ajouté C. Peduto. Mêmes les enfants qui avaient rejoint
"volontairement" l'UPC pour venger la mort des membres de
leur famille n'étaient pas fiers de leurs actes. "Ils
n'ont pas décrit leur expérience comme une victoire".
"Peut-être qu'ils étaient partis pour chercher à
se venger, mais ils n'ont certainement pas trouvé la paix".
Pas de session vendredi 10 juillet. Reprise du procès lundi
13 juillet
Un complément d'information et des cartes de la RDC et de
l'Ituri ainsi que les lettres précédentes se trouvent
sur le site du groupe 405 http://ai405.free.fr
rubrique "Actualité" "Suivi du procès
de Thomas Lubanga.